Bien qu'il soit le directeur d'EP-1, ses passages sur EP-2 étaient réguliers. Après tout, Eve étudiait ici, sa mère était là aussi ; bref, il passait la majeure partie de son temps libre sur EP-2 -même s'il préférait EP-1.
Lors de son passage, il avait croisé la route de plusieurs instructeurs. Marchant à leurs côtés, il les avait écouté faire un bref compte rendu sur le déroulement des cours sur EP-2. Aucun problème, majorité des élèves sérieux, et en dehors de quelques recrues un peu plus farouches que d'autres, aucune ne semblait vouloir se battre avec les autres. Puis, subitement, l'un des professeurs lui montra un papier. L'élève semblait avoir oublié ce papier avec des informations concernant... sa liste de course. Les professeurs rigolèrent un peu, mais signalèrent qu'ils ne pourraient pas lui rendre avant encore une ou deux heures.

C'est pour cette raison qu'Ervin se retrouva dans le dortoir des filles, allant déposer le papier sur le lit de l'élève qui l'avait oublié. L'avantage d'avoir tous les accès et de connaître les plans. C'est alors qu'en repartant, il entendit une petite voix, un peu hésitante. Un appel à l'aide qui sortait de l'ordinaire, pour sûr. Cela venait d'un chambre à la porte entrouverte. Sur le coup, Ervin hésita un instant, mais fini par se placer à l'entrée et répondit.

« Quel est le problème ? »

De sa voix monotone, grave. L'air un peu blasé. Qu'est-ce qu'il venait foutre dans un dortoir de nanas sur EP-2 aussi...

« Sinclair, Monsieur Varga est de passage sur EP-2. Donnez-lui ces rapports. »

Le rouquin redressa la tête, opina du chef et partit avec une enveloppe en main. La seconde depuis ce matin. La première lui avait été donnée par un collègue insistant. Ce dernier avait croisé le regard d'une jeune femme. Une véritable beauté dont il vantait le physique à qui voulait l'entendre ou non. Malheureusement, l'homme était timide et n'avait trouvé d'autre solution, qu'une lettre. Le contenu ressemblait probablement à une rédaction d'adolescent en émoi. Du moins, était-ce le point de vue de Finley. Le transport et la remise de la lettre avaient été négociés. Service contre service, rien était gratuit dans la vie. La confession avait été glissée dans une enveloppe brune, similaire à celles utilisées pour les documents internes. Le but était de ne pas attirer l'attention.

Ses affaires coincées sous le bras, l'homme déambula. Varga, Varga. Où pouvait-il être ? Sa succession de vagabondages ne mena à rien. Si bien, que le rouquin abandonna pour se rendre en direction du dortoir des filles. Plus vite, il se serait débarrassé de cette missive encombrante, mieux ce serait. Avançant dans les couloirs, Finley s'arrêta. Cette silhouette. Son pas s'accéléra légèrement.

« Général Varga ? »

Machinalement, le rouquin tendit une enveloppe sans vérifier s'il s'agissait de la bonne. Discrètement, il regarda la chambre puis le Général puis la chambre.

« Quelque chose ne va pas ? »

« Attends, je vais te donner ça ! » - L'homme d'entretient trop occupé pour repasser dans les toilettes des filles, sympathique - « M-Mais ... Merci monsieur. »

Pas la peine de discuter.
Même si Mérida a juste eu l'idée de passer pour prévenir qu'il n'y avait plus de papiers toilettes dans les chiottes, la voilà dans l'obligation - indirecte - de réapprovisionner le lieu. Heureusement qu'elle a un peu de force et d'endurance dans les bras, en plus du fait de connaître la base. Sinon ... Elle serait pas allé bien loin.

« Dire que j'ai rendez-vous dans trente minutes pour une visite médicale ... J'espère ne pas arriver en retard. »

Très crédible.
Une soldate qui se promène avec du PQ plein les bras. Bien sûr, croiser quelques camarades, on s'en fichait. Elle répondait tout bêtement ; c'est ça ou vous êtes coincés dans les chiottes. Et hop, clapet fermé. Mais des gradés ... Ça risque d'être un tantinet plus compliqué, sachant que ce n'est pas son rôle.

« Encore un peu et. Et. E- ... ?! » - À peine son regard a pu remarquer la présence du général dans les toilettes. Garde-à-vous immédiat ! « G-Général Varga ! »

Et les papiers toilettes se retrouvent par terre. Encore heureux que ce soit propre.

Quel défilé. Et tout ça pour une fille coincée dans ses toilettes sans PQ. Ervin cherchait à savoir si c'était un gag, ou si le problème était sérieux. Regardant le rouquin venu lui tendre une lettre, le Général s'accorda quelques secondes de réflexion, avant de répondre. Du moins, avant d'essayer de répondre ; une autre rousse débarqua au même moment à proximité et fit tomber tout ce qu'elle tenait en le voyant.

...
Silence de mort. Ervin dévisagea sans gêne la demoiselle, puis se pencha pour ramasser un rouleau, gardant la lettre dans son autre main. Il entra dans la chambre, laissant les deux autres à l'extérieur, et s'avança vers la porte des toilettes. Il y jeta un bref coup d'oeil avant de filer un coup de poing à peine fort, juste à côté du verrou ; un clic sonore se fit entendre. Ervin posa le rouleau par terre.

« Le rouleau est devant la porte. »

Non, il allait pas foutre les pieds dans les chiottes. Fallait pas abuser. Se retournant, il revint sur ses pas en ouvrant la lettre. Il dépassa le soldat et l'étudiante, mais s'arrêta à peine deux mètres après, lisant la lettre reçue. C'est une blague ? Ervin releva les yeux de la lettre et les braqua sur le soldat. Avec ses yeux fins et clairs, le Général semblait étrangement méfiant. On le faisait venir jusqu'au dortoir des filles, il y apprenait qu'une fille était coincée dans ses toilettes sans papiers, au même moment un soldat débarquait pour lui remettre une lettre bizarre et une étudiante paniquait en le voyant, arrivant tout pile avec ce que la première fille réclamait ?
Bref regard sur le nom affiché sur porte. Mademoiselle Lucky. "Lucky", pas tellement, mais ce fut un autre détail qui le fit tiquer. C'est la foire aux roux aujourd'hui ? On veut me faire passer un message ? Il en voyait déjà assez, des chevelures flamboyantes. Entre Wanda et Eve...

Retournant la lettre, Ervin la tendit au soldat de manière à ce qu'il puisse la lire, le visage n'arborant strictement aucune expression.

« Navré, je suis marié. »

Etait-ce l'âge ou les nombreuses missions effectuées mais il n'éprouvait plus cette espèce de surprise frénétique face à un haut-gradé. S'il les respectait et agissait en tant que soldat discipliné, une attitude flegmatique était apparue avec le temps. Ses yeux glissèrent sur les rouleaux. En silence, il cala l'enveloppe restante sous son bras puis ramassa ceux restant avant de les tendre à la jeune femme. Ses yeux se plantèrent dans les siens. Le scientifique esquissa un sourire doux à l'attention de la rouquine.

« Tenez, miss. »

Juste deux mots murmurés comme pour se montrer le plus discret possible. Pendant ce temps, le Général revint, il semblait s'être occupé du problème. Finley tourna légèrement la tête pour guetter une réaction ou un ordre. L'homme cligna des yeux puis posa ses derniers sur la lettre. Erreur. Sur la personne et sur le contenu.

« Veuillez me pardonner, je sais que vous n'êtes pas son genre. Je suis confus. »

Une fois les mains libres, Finley procéda à un échange. Si ce n'était pas l'un, c'était forcément l'autre. Et le rapport ne pouvait être que dans l'enveloppe restante. Cela n'avançait guère ses affaires, puisqu'il lui restait à trouver la destinataire du billet doux.

Ne stresse. Surtout. Pas.
Tu te retrouves devant le Général Varga, c'est un puissant homme dont la notoriété n'est pas à contester, ni même à mettre à l'épreuve. Les dires, les rumeurs et autres choses qui peuvent informer les jeunes recrues de la réputation des hauts gradés ... Oui, en effet Mérida, tu n'es pas tombée sur n'importe qui.
Et encore moins n'importe quoi.

Doucement, son regard s'est vu changer de trajectoire en direction de l'autre personne qui était présente. Et par ailleurs, qui a eu la gentillesse de ramasser ce qu'elle avait relâché dans l'immédiat, sans réfléchir.

« Tenez, miss. » Deux petits mots qui ont su attirer son attention. « O-Oh euh ... Merci beaucoup, monsieur. »

Ouh qu'il était beau.
Ouh que ses joues ont pris des couleurs le temps de croiser le regard de cet homme qui semble particulièrement serviable et gentil. Cette hypothèse ne peut être que confirmé ; puisqu'il s'est exécuté lorsque le général avait le dos tourné.

Donc il n'a pas fait ça pour bien se faire voir, juste ... Par gentillesse. En plus de ça, il semble poli, puisque contrairement à d'autres ... Son regard s'est pas figé sur la poitrine de l'adolescente. Beau, poli et gentil, c'est tellement ra-.
Reprends-toi Mérida.

« Eu-euh Général Varga, pardonnez-moi, mais je prends la bête initiative de mettre ses rouleaux à leur place ! » - Un soldat peut prendre des initiatives, tant qu'il reste discipliné et obéissant. C'est l'essentiel.

Surtout lorsqu'elle avait la sensation d'être de trop en compagnie de deux hommes qui sont d'un stade tellement supérieur au sien. Par ailleurs, elle allait sûrement en profiter pour savoir qui se trouvait dans les toilettes, actuellement.

« Excusez-moi, mais avez-vous besoin d'aide ? »

Chuchoté en étant juste à côté de la porte fermé. Après avoir installé deux/trois rouleaux dans les autres cabines.
Adorable Mérida.

Karma, poisse, appelez ça comme vous voulez, mais Ervin se demandait RÉELLEMENT s'il y avait un message subliminal dans cette situation, lorsqu'il vit Nausicaa sortir pour leur faire face. En guise de réponse, Ervin les regarda tour à tour en silence, sans la moindre expression. Il tendit la main en regardant l'homme, puis prit la deuxième enveloppe -cette fois c'était la bonne.

Ni une, ni deux, le Général tourna les talons. Il s'éloigna. Partir au plus vite, retourner bosser, et ne plus croiser de roux jusqu'à ce qu'il retrouve Wanda et Eve. Tel était son objectif à cet instant précis.

Une partie de sa mission était accomplie. Il restait l'autre partie. Retenant que la jeune femme sortie parlait de reprendre son poste, Finley se dirigea immédiatement vers l'autre rouquine. Il souhaitait se débarrasser, pour de bon, de cette missive trop encombrante à son goût.

« Pardon, Miss... C'est important. »

Le scientifique avait pris soin d'ajouter les derniers mots pour n'essuyer aucun refus. De toute façon, ce n'était pas un mensonge. Ses yeux se plantèrent dans ceux de l'élève. Un petit sourire aussi aimable que charmant apparut sur son visage. Sa main droite leva l'enveloppe pour la tendre à son interlocutrice. Il attendit quelques secondes puis fila après avoir lancé un joyeux remerciement et souhaité une bonne journée à la demoiselle.

Ses pas le ramenèrent très vite, à son poste de travail.