Et une journée d’entraînement, encore une. Mais le simple fait de voir qu’il s’agissait de sa dernière année de formation et qu’elle apprenait donc tout ce qui restait à savoir sur le rôle de Maître-Chien suffisait à la ravir. Elle avait de plus en plus envie de passer à autre chose, tout en étant nostalgique à l'idée de laisser derrière elle ces années d’entraînements, ces années en tant qu’élève. Quoi qu’il en soit ce fut donc épuisée, mais satisfaite, que la demoiselle avait pris la navette en direction de la seconde île, rendant ainsi visite à quelques connaissances au passage avant de se diriger, seule, vers le bar Nautilus. Un bar réputé sur cette île, à la fois pour ses cocktails et à la fois pour sa piste de danse qui permettait de se lâcher un peu. Et malgré des membres endoloris, la demoiselle ne rêvait que de ça : danser. Parce qu’elle aimait ça, parce que ça lui faisait oublier le reste, parce qu’elle ne réfléchissait plus. Et enfin parce que, quitte à finir à moitié morte sur son lit ensuite, autant que ce soit pour une bonne raison. Ce fut pour cela qu’elle s’y rendit, outre le fait qu’elle avait appris avec le temps que le bar passait toujours de l’excellente musique.
Arrivée sur les lieux, il ne fallut pas longtemps pour que la blonde se dirige vers la piste en question. Un verre qu’on boit cul sec et la voilà partie. Les heures passent alors qu’elle n’en finit plus de danser, des heures entrecoupées de brèves pauses le temps d’un verre. Et si le plaisir d’onduler suffisait à lui faire oublier tout le reste, la présence d’une personne en particulier suffit à lui rafraîchir la mémoire presque aussi vite. Un déhanché supplémentaire et la voilà en train de lever les yeux, pour capter la silhouette de Perceval un peu plus loin. En train de boire, de discuter peut être, elle s’en moquait pas mal. Elle ne voyait que lui et elle grimaça en tentant de reprendre sa danse. Mais elle était officiellement perturbée. Cela faisait plusieurs mois qu’ils avaient rompus, suite à deux ans de relation. Une engueulade de trop, leurs côtés impulsifs mal gérés, une fierté un peu trop grande de ce côté. Et c’était fini. De manière un peu brutale mais elle avait eu le temps de s’en remettre, de se dire qu’être amis ça serait peut-être mieux, que les inconvénients seraient moins gênants s’ils abandonnaient leur relation de couple. Au fond elle n’avait jamais pu vérifier sa théorie, ayant juste la désagréable impression que le brun l’évitait depuis ce jour.
Trop occupée par sa formation et le reste pour vraiment s’en soucier, la présence de son compagnon la renvoyait cependant à cette situation qu’ils vivaient tous deux depuis plusieurs mois. Un évitement total. Hésitante, la blonde finit par soupirer. Repoussant sa chevelure en arrière d’un geste de la main, elle inspira et quitta la piste d’un pas décidé. Si monsieur ne prenait plus la peine de lui adresser la parole ni même un regard, il était clair qu’elle ne laisserait pas la situation s’éterniser. Perceval restait un mec bien, malgré ce qu’il s’était passé, et elle ne souhaitait pas le voir foutre tout ça en l’air juste pour… Pour quoi d’ailleurs ? Qu’est ce qui pouvait le pousser à l’ignorer de la sorte ? Sa fierté ? Des sentiments qu’il aurait conservé envers elle ? Le besoin de rayer de sa vie toutes les ex ? Difficile à savoir, ce qui incita Drathir à accélérer le pas, encore plus assurée. Elle voulait des réponses. Aussi s’installa-t-elle sans la moindre gêne à côté du jeune homme, commandant un nouveau cocktail avant de vriller son regard d’émeraude sur son interlocuteur.
« Salut. Ça fait un moment… »
Et l’hésitation la saisit, à nouveau, un bref instant. Le temps qu’elle prenne conscience que son approche était trop gentille. Elle était trop tolérante, n’allait pas droit au but. Et surtout il manquait de cette ironie, ces moqueries qui lui servaient de mur. La protégeant ainsi du regard qu’il pourrait poser sur elle, la protégeant de ses propres questionnements aussi.
« Pas facile d’éviter les gens éternellement hein ? »
Sourire moqueur, encore une fois pour masquer de réels sentiments. Bon sang. Ce qu’elle pouvait détester se prendre la tête. Et pourtant cela lui semblait presque nécessaire.
Une question, une seule repassait en boucle dans sa tête: que faisait-il ici? Après une longue journée toujours aussi épuisante, le jeune homme s'était mis en tête d'aller se détendre ailleurs que dans sa chambre. Le bar Nautilus semblait parfait pour décompresser un peu. Pourtant, en arrivant, le brun s'est installé au bar pour ne plus en bouger. Pas une fois il n'est allé sur la piste afin de laisser son corps s'exprimer. Celui-ci a préféré boire plusieurs verres, discutant parfois avec quelques personnes aux alentours. Une chose l'empêchait de se rendre sur la piste. Ou plutôt une personne. Parce qu'il l'avait vu elle. Bien qu'à la base, il ne soit pas vraiment d'humeur à danser, mais sa présence n'arrangeait rien du tout. Cela faisait un bon moment que Perceval cherchait à l'éviter, tout en sachant que ce n'était pas la meilleure option. Le choix le plus intelligent. Malheureusement, il ne semblait pas prêt à engager la conversation. Non, apparemment il préférait rester là et enchaîner les verres. Pathétique? C'est vrai qu'on a vu mieux.
Et donc, le jeune homme était assis, semblait pensif. Elle était là, juste à côté. Mais Percy gardait son regard posé droit devant. Pas facile de taper la discute avec son ex, pas vrai?
« Pas facile d’éviter les gens éternellement hein ? »
Cette réplique lui arracha un sourire. Au moins, elle n'avait pas changé. Comment engager une conversation en beauté, sans passer par quatre chemins. Percy était obligé de répondre, pas vrai? Inutile de faire mine de n'avoir rien entendu et l'ignorer totalement.
▬ Pas aussi simple que je le pensais...
Perceval lui adressa finalement un regard, alors qu'il repoussait son verre un peu plus loin, prêt à en commander un autre. Impossible de fuir désormais. Elle exigera sans doute des réponses à propose de son comportement. Un moment qu'il a cherché à retarder le plus possible.
▬ J'aurais pu partir pendant que tu te déchaînais sur la piste. Tu avais l'air de bien t'amuser en plus, alors qu'est-ce que tu viens faire près de moi?
Et elle se retient de sourire à son tour. Avait-il vraiment pu penser que ce serait si simple ? Que l’éviter serait la solution, qu’il pourrait la fuir éternellement ? Et surtout, avait-il vraiment cru que cette technique aurait fonctionné avec elle ? Drathir, l’impulsive de service qui avait besoin de comprendre, qui n’aimait pas être ignorée non plus, encore moins par les personnes qu’elle appréciait. Une loyauté sans faille qui la poussait vers lui, pour savoir, pour jauger. Une rupture pouvait-elle à ce point éloigner les gens ? La blonde espérait que non. S’emparant du verre qu’on venait de lui donner elle en but une gorgée tout en écoutant son interlocuteur, jetant un bref coup d’œil vers la piste dont il était question. Oui, elle s’amusait bien, et elle se serait amusée pendant encore un long moment si elle n’avait pas découvert sa présence dans les parages. Et puis elle lui fait à nouveau face, capte son regard, repose son verre avant de lâcher, soudainement un peu plus sérieuse. J’aurais dû partir. C’est ça hein ?
« T’aurais dû le faire oui. Et en effet je m’amusais bien, mais danser je peux le faire quand je veux. Te mettre la main dessus c’est plus délicat, alors le choix était vite fait. »
Depuis le temps qu’elle prenait conscience de la distance qu’il imposait entre eux, et depuis le temps qu’elle voulait régler cette affaire. Il était clair qu’elle n’aurait pas laissé passer une occasion pareille de faire le point. Et puis elle n’était pas du genre à fuir, il était donc impossible d’envisager de le laisser filer. Impossible de se dire qu’elle devrait le laisser, ne pas poser de questions, ne pas chercher à comprendre. Impossible de laisser cette situation s’installer plus longtemps. Quoi qu’il en soit la blonde soupira, repoussa quelques mèches blondes en arrière – ce qui était généralement un signe de nervosité, de gêne ou alors un moyen de vous signaler que la suite ne serait pas plaisante – avant de planter à nouveau son regard dans celui de Perceval. Il lui faisait face, alors autant être franche. Brève. Concise.
« Tu sais très bien pourquoi je suis là. Tu me fuis et ça me fait chier. Parce que je ne comprends pas une telle réaction et qu’en plus je n’ai pas le droit à des explications. Et la blonde s’étire, bien décidée à passer le reste de la nuit ici à méditer sur la question avec lui, elle avait tout son temps. Puis elle rajoute, dans un souffle toujours aussi sérieux, vrillant un regard presque insistant sur lui. Légitime. Si tu veux officiellement me rayer de ta vie à cause d’une stupide rupture, faudrait penser à me le dire. »
Elle le méritait bien, non ? Plutôt que le silence, l’absence d’explications, et toutes les questions qu’elle finit par se poser en réponse à sa façon de l’ignorer.
Ça avait été clair et net. Il ne fallait pas attendre autre chose venant de Drathir. Le brun soutenait son regard, sans faillir, analysant alors toutes ses paroles. La rayer de sa vie? Tout de même pas. Parce que le jeune homme savait parfaitement qu'il était en grande partie responsable de cette rupture et qu'il ne pouvait pas s'en prendre qu'à la blonde.
▬ Disons juste que je n'étais pas vraiment d'humeur à te parler ces temps-ci.
Mais depuis le temps, Perceval aurait pu faire un effort. C'est ce que tout le monde devait penser. De toute manière, il n'aurait pas su quoi lui dire, d'ailleurs il ne savait même pas que la jeune femme a cherché à obtenir des réponses. Quoique, il aurait dû s'en douter. Parce qu'il la connaissait plus qu'on ne le croit.
▬ Qu'est-ce que je pouvais bien dire après notre dispute, hein? Ah oui, que je suis désolé. Et je l'étais. Je le suis encore. Mais bon, ce n'est pas des excuses que tu veux, je me trompe?
Et puis il était tard, bien trop tard pour lui présenter des excuses. Ça n'en valait plus la peine désormais. En contrepartie, le brun allait lui fournir ces réponses tant attendues. En espérant qu'elle en soit satisfaite. Percy attrapait son verre, s'amusant à faire tourner le liquide qui le remplissait. Puis, ce dernier reposait son regard sur la blonde, attendant une réponse ou une réaction de sa part.
Pas d’humeur pour lui parler ? Cela durait cependant depuis un moment, elle peinait à croire que c’était la seule raison. Cela aurait été tellement stupide, tellement désagréable à entendre aussi. Si elle parvenait à lui adresser la parole, pourquoi ne parvenait-il pas à en faire de même ? Pourquoi devaient-ils réagir de manière si différente ? La blonde garda toutefois le silence, l’écoutant jusqu’au bout. Il n’avait toutefois pas tort, qu’aurait-il bien pu lui dire par la suite ? Elle l’ignorait, totalement, pourtant elle estimait avoir fait son lot d’effort, à essayer de l’attraper aux détours des couloirs. Il aurait dû comprendre qu’elle avait tourné la page, qu’ils auraient pu juste reprendre une relation tranquille, une simple amitié. Cela lui convenait bien. Sauf que peut être cela ne lui convenait pas à lui. D’où sa question sur le fait d’être rayée de sa vie, s’il devait en arriver à de telles extrémités, elle aurait aimé être au courant plutôt que de la voir la distance s’imposer à n’en plus finir. Quoi qu’il en soit, Drathir tenta une nouvelle fois de masquer sa gêne en s’intéressant à son verre. Il était encore désolé. Bon sang ça voulait dire quoi ça ? Qu’il avait l’impression d’avoir tout foutu en l’air alors qu’il aurait aimé que ça se poursuive ? Qu’il l’aimait encore ? Ce mec finirait par la tuer, c’était certains. Mais elle préféra se soucier de la question qu’il lui posa, ce qui lui évitait de penser au reste.
« Je me doute bien que t’es désolé Percy. Je l’étais tout autant. Mais … Elle inspire, lentement. Cherche ses mots aussi, retient un grognement en découvrant que ce n’était décidément pas si facile que ça, et finit par rajouter, daignant l’observer à nouveau. Mais je comprends pas pourquoi encore maintenant tu m’ignores. J’ai pas l’impression de me comporter en connasse rancunière qui t’accuserais de toutes nos emmerdes alors je saisis pas ton besoin de fuir. »
Lâchant un soupir, la demoiselle joua une nouvelle fois avec quelques mèches blondes avant d’ajouter, sourcils froncés.
« En fait j’ai pas souvenir de t’avoir déjà vu fuir une seule fois. »
C’était probablement ça le plus étrange. Perceval c’était le mec qui cherchait la compagnie, qui disait toujours ce qu’il pensait. Impulsif, colérique parfois. Elle était bien placée pour connaître ses défauts mais savait justement qu’il était bien plus du genre à ouvrir sa gueule une fois de trop que de la fermer et se cacher des gens. Etre la cible de cette fuite, c’était ce qui l’agaçait le plus. Drathir avait pensé, à tort apparemment, qu’ils auraient pu continuer tranquillement en tant qu’amis. En aucun cas elle n’aurait imaginé devenir la fille qu’il ne voudrait plus voir du tout. Être cette exception, cette personne qu’il n’assumait plus. Et ce fut sa rêverie passagère qui l’incita à lâcher dans un souffle, plus pour elle-même que pour lui.
À vrai dire, Perceval ne savait pas plus qu'elle pourquoi il a décidé de la fuir aussi longtemps. Car oui, il se rendait bien compte que fuir, ce n'était pas dans ses habitudes. Alors pourquoi cette fois-ci? Avec elle en plus? Eux qui s'entendaient tellement bien auparavant... Au fond, le jeune homme ne tenait pas vraiment à ce que cela change. L'amitié était sans doute la meilleure relation qu'ils pouvaient entretenir ensemble. Cela ne voulait pas dire qu'il regrettait d'être sorti avec cette dernière, ça a duré deux années tout de même.
▬ Ouais c'est vrai... J'imagine que c'était plus fort que moi...
Ce qui ne devait pas être la plus satisfaisante des réponses. Mais, que dire de plus sauf peut-être qu'il a été con et lâche de l'éviter ainsi au lieu de mettre les choses au clair? Avant que ça n'empire? Au moins, ce n'était pas trop tard. Du moins, le brun l'espérait vivement. Celui-ci termina son verre, d'une traite, avant de soupirer longuement.
▬ Il paraît que la distance aide pour passer à autre chose...
Percy ne tenait pas à se morfondre toute une vie à cause d'un échec. Ils n'étaient peut-être pas faits pour finir ensembles après tout, bien que les deux ans qu'ils ont pu passer tous les deux restaient toujours aussi agréables.
▬ Et toi alors? Un nouveau soupir lui échappe alors qu'il bat brièvement des paupières et commande un autre verre. Tu es passée à autre chose, non?
Drathir garda le silence, le laissant tranquillement réfléchir à tout ça. Elle fut au fond assez satisfaite de le voir progressivement changer d’avis, lui donner raison. Admettre qu’il avait agi de la sorte sans trop savoir pourquoi. La blonde espérait déjà le voir ainsi changer de comportement, tout de suite, qu’il arrête donc de l’éviter. C’était bien la seule chose qu’elle désirait : pouvoir lui parler à nouveau. Ou bien alors savoir pour quel motif, réel et sincère, il ne voulait plus la voir. Le reste, elle s’en moquait pas mal. Dans un soupir, le brun lui parla de la distance qui était parfois nécessaire pour oublier quelqu’un. La blonde se mordit légèrement la lèvre, avant de finir son verre à son tour. Oui, elle oubliait parfois que la réaction de son compagnon était normale. Tout le monde prenait son temps pour oublier l’autre, c’était nécessaire. Mais cela avait été plus rapide pour elle, un peu trop diraient les mauvaises langues. Mais déjà la conversation se mit à graviter autour d’elle, de ses ressentis, de sa façon de gérer les choses. Haussant les épaules, elle répondit alors.
« Oui. Je voyais pas pourquoi il aurait fallu insister, on se serait bouffé un mur à longueur de temps, à force. Donc pour moi c’était plus logique qu’on en reste là, qu’on reste de bons amis. Du coup je me suis pas vraiment pris la tête, même si parfois... Même si parfois l’envie de continuer m’avait séduite. C’est ce qu’elle aurait voulu dire, avouer. Evidemment, comme pour tout le monde, c’était difficile de claquer la porte au nez d’une relation. Mais elle jugeait que le moment ne se prêtait peut être pas vraiment à ce genre d’aveux. Alors elle préféra se taire, se contentant d’énoncer qu’elle ne s’était pas trop posée de questions. C’était ce que les gens lui reprochaient parfois, la jugeant trop insensible sous prétexte qu’elle ne réagissait pas comme tout le monde. Et, craignant qu’il n’interprète mal ses propos lui aussi, la blonde ajouta. Ce qui ne veut pas dire que j’oublie, ou que je regrette. Ni même que j’ai la moindre envie de sauter sur le premier venu. »
Hors de question. Elle et Percy ça avait compté, ça comptait encore dans un sens bien que ce n’était plus de la même manière. Et quelques mois ne suffisaient pas à oublier ça, ou à lui donner envie de se jeter dans les bras d’un autre. Autant profiter de son côté célibataire pendant un temps et éviter les amours qui, décidément, pose bien trop de problèmes. C’était prise de tête, trop. Cela la renvoyait à ce qu’elle était aussi, la contraignait à se questionner également. Etait-elle faîte pour ce genre de relations ? Difficile à dire. Elle ne savait plus. Lâchant un soupir, la demoiselle s’empara alors du verre destiné à la base au jeune homme, qu’elle entama, l’ombre d’un sourire amusé aux lèvres. Au moins cela permettait-il de penser à autre chose. De détendre l’atmosphère, aussi.
« Je serais hyper déçue si tu virais alcoolique par contre. T’es là depuis combien de temps ? Le sourire s’élargit alors, légèrement amusé, avant qu’elle ne demande, curieuse. D’ailleurs… Tu disais que t’aurais dû partir en me voyant. Qu’est ce qui t’as retenu ? »
C'est vrai. Ils ont passé du bon temps ensemble. Un bien-être certes éphémère, mais apaisant. Les disputes n'ont pas été d'une grande aide pour faire perdurer leur relation, mais voilà une preuve qu'ils n'étaient sans doute pas fait pour être en couple. Une amitié était parfaitement envisageable. Le jeune homme écoutait Drathir parler, sans l'interrompre une seule fois. Il tendait juste l'oreille. Ensuite, elle s'appropria son verre, dans un sourire que Perceval ne connaissait que trop bien. Tout d'abord surpris, celui-ci ne tarda pas à afficher un rictus amusé.
▬ Ça ne risque pas d'arriver.
Du moins, il l'espérait. Mais pour le moment, le brun ne voyait pas pourquoi il se foutrait en l'air avec l'alcool. Il n'était certes pas l'homme le plus heureux du monde, mais n'avait aucune raison de déprimer en ce moment. Une rupture? Il a largement eu le temps de méditer là-dessus. Il était temps de passer à autre chose.
▬ J'sais pas... Je suis arrivé avant toi, je crois
Combien de temps exactement, il ne saurait le dire. Percy ne pouvait pas non plus affirmer qu'il était présent depuis plus longtemps qu'elle, ce dernier ne s'en souvenait pas vraiment. Mais peu importe, cela n'avait aucune importance. La réponse à la question suivante, oui.
▬ J'ai trop bu, donc j'étais pas apte à te fuir cette fois-ci. plus sérieusement. Je pouvais pas t'éviter éternellement. C'est chiant, puis tu m'aurais bien manqué à un moment ou un autre. Enfin, c'était déjà le cas depuis longtemps, pour dire vrai.
Bon, au moins ne finirait-il pas ivrogne, c’était déjà ça. Même si, au vu des autres réponses qu’il alla lui fournir, la blonde se doutait qu’il n’en était pas à son premier verre pour autant. Au moins était-il suffisamment sobre pour leur permettre d’avoir une conversation sérieuse et non pas interrompue par des gloussements ou des remarques aussi déplacées que stupides. Elle-même ne tolérait pas l’alcool, le supportait mal. Ce fut pour cela que, suite à sa petite provocation en ayant entamé le verre du jeune homme, elle lui rendit finalement la boisson. Elle connaissait ses limites et hors de question de les franchir. Cela aurait été ridicule au possible. Hochant la tête quand il affirma être arrivé un peu avant elle, à priori, elle capta alors le rictus amusé qu’il arborait. Satisfaite à l’idée de lui avoir arraché cette expression, son propre sourire finit toutefois par disparaître quand il avoua que s’il n’avait pas fui, c’était parce qu’il savait depuis longtemps qu’il aurait à lui faire face. Et puis elle lui manquait. Elle lui manquait.
C’était là une des faiblesses de Drathir : elle ne savait pas gérer les bons sentiments. Les remarques agréables, les attentions, les douceurs. Si elle les acceptait, elle ne savait jamais comment se comporter face à ça et surtout elle s’en retrouvait gênée. Gênée par son incapacité à trouver quelque chose à dire et gênée par le fait que l’on puisse tenir à elle. Trop souvent persuadée de n’être qu’une casse couille aux yeux des gens, elle en oubliait que tous ne la considérait pas ainsi. Ou pas que, en tout cas. Mais même ça, elle ne pouvait pas le lui cacher. Il la connaissait, se doutait probablement qu’elle ne répondrait pas à cette belle remarque à son égard. Vrillant son regard dans le sien, elle hésitait quant à l’attitude à adopter. Evidemment que lui aussi il lui avait manqué, sinon elle n'aurait pas pris la peine de l’aborder pour mettre des choses au clair. Elle voulait le retrouver. Et venait de le faire dans un sens. Mais, comme prévu, elle ne daigna pas le lui dire, se contentant d’arborer un nouveau un mince sourire. A la fois léger et amusé. Et puis…
« Viens danser. Elle ne lui demandait clairement pas son avis, comme pouvait en témoigner sa main qu’elle referma sur son poignet. Un mouvement ferme, quoi que délicat, alors qu’elle ajoutait : Y a trop de pervers, tu les feras fuir. »
Autant l’éloigner du bar tiens, autant profiter de sa présence pour dissuader de potentiels dragueurs de l’aborder et… autant profiter de lui. Tout simplement. Se redressant, la blonde l’entraîna à sa suite, assurée. S’il pensait pouvoir se barrer, il se trompait lourdement. Arrivant ainsi sur la piste de danse, la demoiselle daigna enfin le lâcher pour lui faire à nouveau face. Attendant une nouvelle musique elle se mit à y bouger en rythme avant de lâcher, son regard dans celui de son interlocuteur, une lueur provocante dans les yeux.
« Enfin… Sauf si t’es devenue une loque un peu trop grande gueule qui sait plus comment mettre le feu à la piste. »
Il bougeait bien, était bien placée pour le savoir. De toute manière le plus important n’était pas la manière que l’on avait de danser, mais bien le plaisir qu’on y prenait. Le simple fait de se lâcher vous donnait du talent, outre le fait que vous affirmiez au monde entier vous moquer de l’avis général. Tout du moins c’était ce qu’elle pensait.
Oui, il s'en doutait. Et le jeune homme l'avait dit tout en sachant qu'il n'obtiendrait aucune réponse de sa part. Mais peu importe, tant qu'elle avait compris. Oui, qu'elle comprenne. C'est tout ce qu'il attendait de la jeune femme. Perceval termina alors son verre, puis sentit une main se refermer autour de son poignet, Drathir qui l'obligeait à se rendre sur la piste.
▬ Oh non, j'suis très bien ici...
Juste qu'il ne tenait pas à se trémousser. Le brun savait danser, bien évidemment, mais celui-ci n'était pas très chaud en ce moment. Peut-être préférait-il boire comme un trou ou tout simplement rester assis, peut-être à discuter avec quelques personnes. Mais apparemment, la blonde en a décidé autrement. Il savait que ça ne servirait à rien de se débattre. Du coup, Percy la suivit docilement, quoiqu'un peu réticent. Ce dernier l'observa un instant avant que Drathir ne prenne à nouveau la parole. Sourcils légèrement arqués, il lui adressa un sourire.
▬ Bien... Il se rapprochait de quelques pas, commençant ainsi à mouvoir son corps en rythme, souriant toujours. Mais, si je tombe, tu me rattrapes.
La blonde s’autorisa un sourire en le voyant tout d’abord réticent à l’idée de danser, sauf qu’elle insistait, qu’elle ne lui laissait pas le choix. Et puis finalement il se prêta au jeu, lui faisant face avant de se mettre à se mouvoir à son tour au rythme de la musique, à ses côtés. Il semblait plus amusé. Ce changement d’attitude lui plût, elle n’aurait pas à insister ou à trouver un stratagème quelconque, elle n’aurait pas non plus à retourner auprès de ce bar qui ne l’intéressait pas le moins du monde. Drathir finit sentir son sourire s’élargir, sans qu’elle ne puisse vraiment le contrôler, quand elle le vit lui adresser la parole à nouveau. Le rattraper, hein ? La jeune femme hésita un instant sur la manière de procéder, la réplique à lui offrir, mais finit toutefois par souffler :
« Je ne te laisserais pas tomber. »
L’espace d’un instant, ses prunelles d’émeraudes se mirent à briller d’un éclat soudainement bien sérieux. Il y avait plusieurs sens que l’on pouvait attribuer à ses propos. Elle ne le laisserait pas tomber. Ne venait-elle pas de le prouver, déjà, en allant le voir ? En réclamant des explications et des réponses, en refusant de le voir lui échapper ? Elle tenait à lui, et sa loyauté n’était plus un secret pour quiconque la connaissait un minimum. Elle n’était pas de ceux qui abandonnaient leurs proches. Jamais. L’ambiance militaire de l’île et de leurs formations ne changeait rien à cela, au contraire même. Quoi qu’il en soit, elle se concentra à nouveau sur sa danse, jetant quelques coups d’oeils à son compagnon. Parfois, en voyant quelqu’un s’approcher d’un peu trop près d’elle, elle se rapprochait de Percy, ou le contraignait à la faire tournoyer, signalant ainsi clairement qu’elle était déjà occupée avec quelqu’un ce qui dissuadait la plupart des personnes à lui faire de potentielles demandes. Et puis, comme pour s’assurer que leur discussion avait pris fin sur une note positive, et surtout partagée, la blonde jeta un dernier regard au brun, demandant alors dans un souffle, à peine perceptible au vu de la musique.
« Du coup.. Tu vas enfin arrêter de m'ignorer maintenant ? »
Histoire de pas avoir à se coltiner une autre conversation sérieuse suite à un malentendu entre eux ce soir là.
Je ne te laisserais pas tomber. C'est bien ce qu'elle venait de lui dire, pas vrai? Il ne rêvait pas? Ce n'était pas non plus l'alcool qui lui faisait entendre ce genre de choses? Non, le jeune homme ne s'y attendait pas. Mais alors pas du tout. Donc surpris, ce dernier s'arrêta donc un instant, fixant brièvement avant de sourire. Oui, un sourire, petit mais bien présent. Percy ne cachera pas que cette simple phrase le rendait... Disons... Heureux? Ensuite, le brun se remit donc à danser, laissant Drathir l'utiliser pour éloigner les hommes qui lui tournaient autour tels des vautours. Au moins, il servait à quelque chose. La jeune femme lui posa une nouvelle question. Le brun haussa les épaules.
▬ Qu'est-ce que tu préfères?
Une question plus qu'inutile, étant donné qu'il connaissait déjà la réponse. Il n'avait encore rien fait qui puisse lui faire changer d'avis et honnêtement, Perceval ne tenait pas à perdre une amie comme Drathir. Et ça, il ne lui avait jamais dit. Oui parce qu'auparavant, ils n'étaient pas "juste" amis. Oui, mais ça, c'était avant.
▬ Je vois pas pourquoi je devrais t'ignorer encore... Je veux dire... On s'est expliqué, tout est rentré dans l'ordre... Non..?
Drathir dû quant à elle se retenir de se stopper dans ses mouvements quand elle vit son compagnon s’arrêter pour la fixer, comme surpris. Il faut croire qu’il ne s’était pas attendu à une telle remarque, spontanée et sincère, mais semblait être satisfait de l’entendre tout de même. Encore heureux. Manquerait plus qu’il soit indifférent à une telle marque d’affection, auquel cas elle lui en aurait collé une pour lui rappeler que quand elle disait un truc gentil, pour une fois, il fallait savourer et montrer qu’on était flatté par un tel comportement venant d’elle. Dans tous les cas la conversation se poursuivit quand la blonde voulu s’assurer que la discussion qu’ils avaient eu plutôt s’était bel et bien conclue sur une note positive. Ce que lui confirma le brun dans un haussement d’épaules. Il semblait même douter désormais, comme peu assuré, comme s’il avait mal comprit ce qu’elle avait pu lui dire jusque-là. Aussi le rassura-t-elle, également satisfaite de sa réponse.
« Oui oui, je voulais juste être sûre. Oublie du coup. »
C’était dit, c’était fait, c’était réglé. Ce fut pour cela que la demoiselle continua de danser, incluant parfois son compagnon dans ses mouvements, profitant des instants pour lui sourire légèrement. Et puis elle repensa à ses réticences vis-à-vis de la piste qu’ils foulaient désormais. Se disant qu’elle s’était suffisamment amusée de ce côté-là pour la soirée, la jeune femme s’arrêta alors soudainement et demanda alors, une main sur la hanche, l’autre repoussant en arrière quelques mèches de sa chevelure.
« Tu veux faire quoi plutôt ? Vu que tu ne voulais pas danser, mais que je t’ai forcé. On peut aller ailleurs si tu préfères. »
Elle avait eu sa dose, aussi décida-t-elle d’arrêter de le monopoliser pour une activité qui ne semblait pas l’emballer tant que ça malgré tout.
▬ Hum... À la base, j'avais prévu de boire quelques verres avant de sauter dans mon lit.
Parce qu'il n'a pas du tout prévu que la jeune femme puisse venir par ici. Encore moins l'aborder. Il est vrai qu'au départ, le brun fut assez réticent à l'idée de discuter avec cette dernière, de peur que cela se finisse mal. Encore une fois. Mais maintenant, il était bien sûr soulagé qu'ils aient pu tirer tout ça au clair. Peu de personnes parviennent à faire ami-ami avec une ex. Pourtant, ce n'est pas impossible, surtout lorsque l'on tient vraiment à cette personne. Perceval était bien mal placé pour dire cela, sachant qu'il a réussi à la fuir après la rupture. Enfin, c'était du passé.
▬ Je doute que tu veuilles m'accompagner.
Non, en réalité, il en était certain. Et c'est dans un minuscule sourire qu'il prononça ces mots. Percy était bien évidemment prêt à sacrifier quelques heures de sommeil pour Drathir, à moins que celle-ci ne désire le quitter dès maintenant. Si oui, elle lui en fera part.
La blonde l’écouta lui répondre, toujours immobile face à lui, cette main fixée sur sa hanche, l’autre le long du corps. Apparemment il avait prévu une soirée plutôt tranquille, passée à boire quelques verres pour finalement aller se coucher. Ivre ou non, difficile à dire, difficile de prévoir également. Mais la jeune femme ne daigna pas le questionner à ce sujet, elle n’en eut de toute manière pas le temps car déjà son interlocuteur reprenait la parole, affirmant ainsi qu’il doutait de la voir désireuse de l’accompagner. Il poussa même le vice en s’autorisant un sourire pour ensuite lui poser la question franchement. N’est ce pas ? La blonde se tendit imperceptiblement. Décidément, à peine les soucis entre eux étaient-ils réglés que ça revenait à la charge. Elle n’avait rien contre ce genre d’humour et de provocation, mais elle était surprise de le voir lui en parler si vite. Laissant quelques secondes s’écouler, Drathir finit par s’autoriser un sourire amusé avant de secouer la tête en guise de négation.
« Bien vu, j’ai pas décidé de quitter ton lit pour y retourner aussi vite. »
Quant à cette histoire de verre cependant… Non décidément ce serait une mauvaise idée. Elle ne tenait pas l’alcool, le savait parfaitement et avait justement évité de trop boire ce soir. Elle n’allait pas foutre toutes ses résolutions en l’air maintenant. Ce fut pour cela qu’elle finit par hausser les épaules, pour rajouter.
« Du coup je vais te laisser à tes verres et ton lit. A une prochaine, probablement ? »
Il n’y avait de toute manière plus aucune raison pour qu’ils s’évitent. Dans un dernier sourire, la blonde s’éloigna donc, le laissant ainsi à ses activités.
Spoiler:
J’étais à court d’idée, mais si quelque chose te viens en tête envoie un mp, on en parle et j’éditerais au pire.
Oui, c'est vrai qu'il n'existait plus aucune raison pour qu'ils s'évitent. Quoique, on ne sait jamais, tout peut arriver. Mais, le jeune homme préférait rester positif, ne voulant en aucun cas détruire cette relation qu'il entretenait désormais avec la blonde. Ah oui, parce qu'il y tient mine de rien.
▬ Dommage, la place est encore chaude...
Non, il ne cherchait pas à la ramener dans son lit, il n'oserait pas. Et puis ça n'arrangerait en rien leur relation. Et Percy était bien content de ne pas avoir trop consommé, sinon Dieu sait ce dont il aurait été capable de faire. Parce que Drathir restait une jeune fille séduisante autant physiquement que mentalement. En tout cas, lui a été charmé par son comportement.
▬ Maintenant que ça s'est arrangé, je vais venir te voir si souvent que tu regretteras le moment où je t'évitais.
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