Ce matin-là, ce fut particulièrement difficile d'émerger pour Neils. Impossible de déterminer quelle heure il était ; sa main tendue cherchait son réveil en tâtonnant, mais même la table de chevet qui était habituellement là avait disparu. Il fronça les sourcils en poussant un léger grognement et reposa sa main sur son ventre, avant d'ouvrir les yeux et regarder le plafond qui lui semblait irrégulier et inhabituel. Il ne se sentait pas très bien, là. Sans doute la gueule de bois suite à sa petite beuverie de la veille, dont il ne gardait que de très vagues souvenirs.

La réalité commença à s'infiltrer doucement par ses narines. Il sentait une odeur féminine à laquelle il n'était pas du tout habitué, la couleur des murs n'était pas celle de sa chambre, et celle dans laquelle il se trouvait était bien plus petite et modeste que la sienne. Il écarquilla les yeux et en voulant se relever brusquement, il tomba du lit et se cogna la tête sur le sol, accentuant davantage sa douleur au crâne. En se retournant pour s'allonger sur le dos, il tira le drap et s'enroula dedans, avant de réaliser qu'il était à poil. On dirait que je me suis payé du bon temps cette nuit, pensa-t-il, même s'il ne s'en souvenait pas vraiment.

Mais maintenant, ça lui semblait clair, il n'était pas chez lui. Et ce n'était pas Raphaëlle qui partageait son lit ce matin. Neils resta allongé par terre et se plaqua une main sur le visage en pensant à elle. Putain, qu'est-ce que j'ai encore foutu.

Et soudain, un hurlement le sortit de ses pensées. Il sursauta et se redressa brusquement, tournant la tête vers Nausicaa qui semblait paniquée comme si un voyeur était rentré chez elle. Non mais faut qu'elle se calme celle-là. Voilà un point sur lequel elle n'avait pas changé ; elle paniquait toujours pour rien et l'exprimait de façon très excentrique. Son beuglement fut très irritant. Il fronça les sourcils et la regarda d'un air agacé, avant de se lever, laissant tomber le drap par terre, sans se soucier du fait que la rousse le voit nu.

« Oh, la ferme. » lâcha-t-il sèchement, alors qu'elle lui faisait un mélodrame de petite pucelle. À croire qu'elle n'avait jamais eu d'homme dans son lit. Et vu comme ils avaient bu la veille, ce n'était pas si étonnant que la soirée se soit terminée de cette façon... Il se pencha pour ramasser son caleçon qu'il enfila avec son jean. Lorsqu'il eut finit de remonter sa braguette, il reposa son regard sur Nausicaa, l'air sévère et réprobateur. « Toi, j'espère que tu prends la pilule. » Et même si ce n'était pas le cas, ce serait vite réglé.

« Tu crois que je me trimballe des capotes alors que je reviens de mission ? » Franchement, un peu de bon sens. Avant, il était bien plus vigilant avec ça parce qu'il couchait avec beaucoup de femmes différentes, mais maintenant qu'il était avec Raphaëlle, il avait perdu l'habitude d'utiliser le préservatif – elle était stérile, alors à quoi bon. Poussant un long soupir d'agacement, il ramassa sa chemise et la remit sur ses épaules, sans la reboutonner. Après que Nausicaa soit sortie de la chambre pour aller dans la cuisine, il la rejoignit en se grattant légèrement la tête, et poussa un bâillement.

Faisant comme s'il était chez lui, il commença à ouvrir les placards, à prendre une tasse et une cuillère, à chercher dans tous les tiroirs ce dont il avait besoin tous les matins. L'agencement de cette cuisine était inhabituel, différent de celle dont il avait l'habitude, et ça l'agaçait, parce qu'il ne trouva pas un seul grain de café. « Putain, y a pas de café dans cette piaule ? » questionna-t-il d'un ton presque agressif. La gueule de bois le mettait de très mauvaise humeur, et c'était dans ce genre de moment qu'on avait le moins envie d'avoir affaire à lui.

Il leva les yeux au ciel en entendant Nausicaa lui indiquer le placard où était rangé le café. Il attrapa ce dernier et alluma la machine à café pour s'en préparer un, sans quoi son cerveau ne pouvait pas fonctionner correctement le matin au réveil. Lorsque le café fut prêt, il attrapa la tasse et souffla un peu dessus, avant d'en prendre plusieurs gorgées. C'était quand même meilleur et moins néfaste qu'une bouteille de whisky. Maintenant qu'il avait eu son café, il tourna la tête vers Nausicaa lorsque celle-ci jura de ne plus toucher à de la vodka.

« Pff, ne me fais pas croire que t'as pas pris ton pied. » Lui par contre, il ne tenait pas à crier sur tous les toits qu'il avait pris du bon temps ce soir-là, après s'être bourré la gueule. Il n'avait pas pensé aux conséquences que cela pourrait avoir, mais il se disait que pour rien au monde il ne voudrait perdre Raphaëlle. Les yeux rivés sur son café, il fronça les sourcils, serrant sa prise sur la hanse de la tasse. Je dois le dire à Raph ou le lui cacher en espérant qu'elle ne le saura jamais ? Putain, quel con. Il reprit une dernière gorgée de son café. « Au fait, t'as intérêt à ne parler de ça à personne. » dit-il sur un ton sec, en reposant la tasse nerveusement.

Neils restait de marbre devant les paroles de Nausicaa. Il aurait pu simplement l'ignorer, mais la façon qu'elle avait de s'adresser à lui était irrespectueuse de son grade. Il tourna la tête vers elle et planta son regard dans le sien, le menton un peu relevé et les sourcils légèrement froncés.

« Je me passerai de tes remarques. Et arrête de me tutoyer, je suis pas ton pote. »

Il tenait à restaurer une certaine distance hiérarchique. La seule personne qu'il laissait le tutoyer était Raphaëlle et il n'était pas prêt de laisser cette fille lui parler ainsi sous prétexte qu'ils s'étaient envoyés en l'air le temps d'une nuit. Malgré ce qu'il s'était passé, il ne fallait pas qu'elle oublie quelle était sa place. Il était ferme là-dessus.

Une fois son café terminé, il reboutonna rapidement sa chemise et jeta sa veste sur son épaule, avant de lancer un regard mauvais à la rousse. « Je me tire, salut. » Pas question de rester ici plus longtemps. Il ne lui devait rien, et à l'heure actuelle, il n'avait qu'une envie : retrouver Raphaëlle.