Dans la série repli stratégique, il y avait un endroit parfait : le cinéma. Non, parce que Mark n'y allait pas pour le chef d'oeuvre entrain d'être projeté, il y allait pour se planquer. Pas envie de parler. Pas envie d'être social. Alors le blond s'était planqué dans une salle. Il n'avait même pas prêté attention au titre du film. À vrai dire, il avait à peine suivi le film. Il y avait des explosions, des courses poursuites et une succession d'actions qui le laissaient songeur.
Une scène vint interrompre ce déluge d'actions. Des jambes de femme étaient passées au tour de la taille d'un homme. Un bureau. Des vêtements qui glissaient sur la peau. D'habitude, le blondinet aurait été intéressé mais là, il s'enfonça dans son fauteuil et ferma les yeux. L'avantage, c'était qu'il n'y avait pas de dialogue pour cette scène.
Il y avait juste des bruits très suggestifs.
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Katarina Olivero
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Un film à la sauce américaine couvert d'une aventure dangereuse avec des héros torturés qui risqueront de fortement finir ensemble. Pourquoi pas ! Katarina avait du temps devant elle et elle voulait s'évader à travers un film dépaysant. C'était l'idéal. Munie d'une réserve de barres chocolatées et du numéro de salle en tête, elle s'aventura à l'intérieur de la supposée salle de projection.
Le film avait déjà commencé – tiens ?. Eh bien, ils devaient pensé à vérifier les horaires parce que le film avait démarré plus tôt que prévu ! Katarina s'installe à la première place en bout de rang. Manque de bol, une grande perche l'empêchait de profiter pleinement de l'écran. Alors, elle se relève, sa réserve de nourriture dans un sac plastique en main et se déplace en pas chassés pour être au milieu de la rangée. Tout en se déplaçant, elle s'interroge sur la scène du film. Bon sang, mais c'est quoi cette scène ?! C'était prévu dans le film ?! Minute, elle ne s'était pas trompée quand même ? Elle s'assied pour attendre de voir.
Bien entendu, c'est juste en posant ses fesses qu'elle s'aperçoit que le siège est déjà pris. D'un bond, elle se relève, empourprée et bafouille :
« - Oh ! Pa...par... pardon ! Désolée, je n'ai pas fait attention, j'ai cru que le siège était libre ! Vraiment, je suis désolée. »
Elle s'assied juste à côté et se fait toute petite. Décidément, elle n'en loupait pas une ! Ses yeux glissent timidement pour tenter d'apercevoir la personne à ses côtés, malgré la pénombre.
Les bruits duraient toujours et lui, il n'avait pas ouvert les yeux. Il essayait de s'imaginer la scène, sauf que son petit jeu fut vite perturbé par un poids. Ses paupières se soulevèrent. Il cligna des yeux en voyant la personne se relever brusquement, mais resta silencieux pendant quelques secondes.
« - Y a pas de mal ! »
Un sourire en coin apparut sur son visage. Toutefois Mark ne prit pas la peine de détailler l'inconnue. Ses yeux bifurquèrent directement sur l'écran. L'arrivante avait l'air aimable, facilement gênée. Etrangement, ça ne collait pas du tout avec la projection du moment. Certes, l'histoire du film ne se résumait pas à montrer les différentes façons dont un bureau pouvait être utilisé, mais...
« - Drôle de film pour une fille... »
Comme quoi, il fallait toujours se méfier des apparences. C'était comme avec les bourgeoises coincées...
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Il faisait trop noir pour le distinguer mais à l'entendre, il ne semblait pas plus offensé que ça. Ouf ! Sauvé, ça n'était pas un débile profond plein de muscles prêt à lui réclamer une compensation ou pire ! Un vieux pervers ! Cette simple pensée la fit frissonner. Ainsi, elle se cala dans son siège et essayait de comprendre les images qui défilaient à l'écran. Mais, qu'est-ce que c'était que ce film ?! Où était le fantastique ? L'action ? Le frisson ? Et puis, il semblait que l'histoire était déjà bien aboutie, plus que ce qu'indiquait le résumé. Elle écarquilla les yeux et tourna la tête vers sa « victime ».
« - Hum … disons que je m'attendais pas à ça. »
Oui, c'était le mot. Ne pas s'y attendre. Elle détourna les yeux de l'écran, ne voulant absolument pas connaître l'anatomie des deux protagonistes.
« - A l'affiche, ils indiquaient « Film fantastique, action », ce genre de choses. Mais, je vois rien de fantastique à ça ! »
Elle haussait le ton et fronçait les sourcils, excédée. Aussitôt sortie, elle irait en toucher deux mots à ceux qui se permettaient de se tromper de cette manière dans les programmes. En attendant, la voilà bien, elle avait écrasé quelqu'un et se retrouvait devant une scène pareille dès son arrivée. La totale !
« - Et j'imagine que c'est tout à fait adapté à un homme, ce genre de production ? »
Histoire de renvoyer un peu la balle à cet inconnu. Elle emprunta un ton légèrement amusé pour faire s'évanouir le souvenir de sa colère.
Ah, il ne pouvait pas contredire la demoiselle sur ce point, si elle affirmait que la projection devait être un film fantastique. Il n'avait pas fait attention à ça. Enfin, il y avait bien une chose qui pouvait coller. La plastique de l'actrice était fantastique. Tout en pesant le pour et le contre, Mark fixa l'écran.
« - Bien sûr. Rien que pour la qualité des dialogues et du jeu des acteurs... »
Une pointe de sarcasme se nicha dans sa voix. Parce qu'évidemment avec les dialogues inexistants, il n'y avait rien à écouter. Tout en étirant ses jambes, le blond regarda le siège en face du sien. Il essayait de se raccrocher aux scènes puis perdait le fil tout de suite après. Décidément, il valait mieux abandonner. Son visage se tourna en direction de sa voisine.
« - Pas trop déçue tout de même ? »
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Évidemment. Quel homme n'aurait pas la curiosité d’assister à un film pareil, simplement pour savoir de quoi il en retourne ou mieux, pour mater une actrice botoxée et bien foutue ? Katarina leva les yeux au ciel. Ou plutôt, au plafond noir. Et ne sachant que regarder d'autre que l'écran, elle fixa un point au loin et réfléchit à la question de son voisin.
« - Et vous ? Son corps est-il à la hauteur de vos attentes ? »
Elle avait l'impression qu'il était le genre de type à l'humour assez large. Sans doute prendrait-il sa question de manière décontractée et non pas outrée. Elle ne répondit qu'après à la question qu'il lui avait posé.
« - J'ai vu beaucoup mieux. En tout cas, ça m'étonnerait que celui-ci est été récompensé vu son intérêt ... »
Vivement que cette foutue scène prenne fin. En vrai, est-ce que ces choses-là duraient aussi longtemps ou bien les personnes qui vivaient la même chose étaient-elles pressées par le temps ? Imaginez que quelqu'un débarque au beau milieu de leurs ébats …
« - J'imagine pas la tête qu'ils feraient si quelqu'un entrait à ce moment-là. La honte ... »
Dommage, ça aurait pimenté un peu le film. Quoi que, c'était peine perdue.
En fait, il n'en savait rien. Cette question méritait d'être étudié la femme concernée avant de répondre. Mais Mark n'en avait pas envie, il préférait écouter sa voisine. Il aimait bien sa manière d'exprimer, un poil sarcastique et puis, elle ne l'avait pas envoyé bouler en le taxant de pervers. Ses dernières paroles lui arrachèrent un rire léger. La honte ? Ses épaules se haussèrent légèrement.
« - Le problème serait ailleurs. Ça casse surtout l'envie de continuer, à moins d'être exhibtionniste... Et ça... »
Ce n'était pas tout le monde. Mais dans un film tout était possible, il n'y avait que les limites du scénariste et du réalisateur.
« - Mais au lieu de parler de l'actrice, que pensez-vous de l'acteur ? »
Un sourire en coin apparut sur son visage. On ne la lui faisait pas. Il y avait des filles pires que les mecs sur certains sujets.
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Une hésitation, visiblement. Peut-être s'agissait-il d'un homme qui n'accordait que peu d'importance au plastique de cette actrice semblable à une poupée Barbie. Quoi qu'il en soit, elle était curieuse à présent. Mais, la réplique de son voisin eut le don de la faire grimacer :
« - Beurk, quelle horreur ! Ça existe ça ? Des personnes excitées par le fait d'être vues ... »
Katarina s'imaginait tomber devant une scène pareille dans la réalité. Elle se demandait quelle pourrait être sa réaction. Du dégoût ? Sûrement. De l'incompréhension ? Aussi. Sans doute resterait-elle bouche bée pendant un instant avant de quitter la pièce, les joues roses, les yeux écarquillés. Si ça venait à arriver, elle serait traumatisée à jamais ! D'ailleurs, ce simple instant d'imagination la fit rougir. Elle se racla la gorge pour effacer toutes preuves qui pourrait trahir sa gêne.
« - Humm ... »
Il lui avait renvoyé sa question sans répondre finalement. Dommage, elle devrait prendre son mal en patience. En attendant, elle observa l'acteur du mieux qu'elle pouvait. Hum … ouais... d'accord … ça peut aller... ok.
« - Eh bien, je n'ai pas vraiment de point de comparaison, mais il m'a l'air potable dans l'ensemble ? Enfin, inutile de se leurrer, ce n'est pas parce qu'elle a l'air de prendre son pied qu'elle aurait réellement un orgasme avec lui dans la réalité. Non ? »
Analyse terminée. Kata' avait déballé sa théorie comme une hypothèse scientifique. Ça restait tout de même de la science, non ?
Tout existait mais il n'avait pas tellement envie de partir dans ce genre de discussion. Pourtant, il y avait de quoi dire, juste pour l'embobiner. Enfin l'arrivante ne semblait pas avoir besoin de lui. Son raclement de gorge lui paraissait bien suspect. La suite le laissa perplexe. Sourcil droit arqué, Mark tourna la tête. Pas de point comparaison ? Il y avait tous les militaires comme point de comparaison ! Elle pouvait comparer avec n'importe quel camarade ou supérieur.
« - Minute, minute, tu regardes jamais les mecs qui t'entourent ? »
La question de l'inconnue avait été tout simplement balayée. Son esprit se focalisait sur autre chose et il n'y avait que ça qui comptait.
« - T'es vraiment un spécimen étrange... »
Il était bien placé pour faire ce genre de commentaire.
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Katarina distinguait le visage de son voisin, comme surpris par ce qu'elle venait de lui révéler. Comment ça regarder ? Bien sûr qu'elle regardait les autres mecs. Quand ils la bousculaient ou venaient lui chercher des noises, elle était bien obligée de les regarder pour savoir où les cogner ! Mais, elle n'avait pas à l'idée de les regarder d'une manière particulière.
Un spécimen … étrange ? Elle ne fut pas offensée d'entendre ça, au contraire, cela sonnait comme un compliment à ses oreilles. Lorsqu'elle disait d'un animal qu'il était un spécimen étrange, c'est parce qu'elle n'en avait jamais vu de semblable, avec autant de potentiel. C'est pourquoi, elle se contenta de sourire, assez flattée.
« - Merci beaucoup ! Mais, non. J'ai horreur des autres, alors je ne vois pas pourquoi je les regarderai quand ce n'est pas utile. Surtout les garçons. D'ailleurs, qu'est-ce qu'il y a à voir de particulier ? »
Le visage curieux et naïf, elle attendait une réponse cette fois. Il lui était arrivée d'entendre des filles s'extasier sur la plastique de tel ou tel homme sans qu'elle en comprenne les raisons. Elle avait plus envie de leur dire « Du calme, poulettes ! Pas de quoi fouetter un chat ! ». Les pintades, alors ... Elles s'émoustillaient pour un rien.
Ses yeux clignèrent plusieurs fois. C'était quoi ce spécimen ? Bien sûr, qu'il savait qu'il existait plusieurs races des filles. C'était comme les poules. Il y avait la Barbu de Thuringe, la poule de Rhénanie, la Sundheimer, la Vorwerk, la Sulmtaler, la Lakenfelder etc. Mais on pouvait connaître les races sans jamais en croiser certaines.
« - Minute, minute... »
L'air incrédule, il se tourna vers sa voisine. Le film lui passait à des milliers de kilomètres au-dessus de la tête.
« - Tu veux dire que tu es le genre de fleur qui éclôt à retardement ? »
A l'âge où la plupart minaudait ou s'émoustillait pour un simple regard ou une parole, elle s'en fichait totalement. Mais peut-être que...
« - T'es pareille avec les filles ? »
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A le voir, on croirait qu'elle avait sorti la plus grande des âneries du siècle. Eh bien quoi ? C'était une question piège ? Une caméra-cachée façon surprise-surprise ? A ce qu'elle sache, il n'y avait rien de choquant dans ses propos. Et puis, c'était quoi exactement cette question ?
Il l'interpelle et elle s'attend au pire. Hein ?!
« - Mais de quoi tu ... »
A son tour de cligner des yeux, complètement paumée. Maintenant, elle était une fleur ?! Éclore à retardement. Qu'est-ce qu'il voulait dire par-là ? Qu'elle était longue à la détente ?! Cela dit, il n'avait pas tort. Quelques fois, il lui fallait un moment avant de saisir la portée de quelque chose. La rouquine se demandait comment il pouvait bien le savoir d'ailleurs puisqu'elle ne l'avait jamais rencontré auparavant.
Interloquée, elle réfléchit. Quoi, pareille ? Si elle ne comprend pas avec quelqu'un, elle ne comprendra pas mieux avec une fille ! Ah ! Non, il parlait de sa façon de regarder les filles. Mais …
« - Mais pourquoi toutes ces questions ? Et pourquoi je regarderai les filles aussi ? Ça va pas ?! »
Après avoir mimé un signe de débilité avec sa main, elle s'enfonça dans son siège comme pour échapper à cet homme bizarre. En fait, elle avait le chic pour se mettre dans la panade avec des personnes très, très bizarre. Drôle d'idée, comme si elle allait regarder les filles en se disant … en se disant quoi d'ailleurs ? Son visage afficha une mine pensive.
« - Qu'est-ce qu'on est censé penser en regardant quelqu'un ? »
Ses yeux se figèrent sur son interlocuteur, un peu sceptique.
Parce que je trouve ça drôle et que ça m'occupe. Ce genre de réponse était inapproprié mais ce ne fut pas pour ça qu'il resta silencieux. Mark n'avait pas envie d'expliquer son raisonnement ou ce qu'il y avait derrière. Ses yeux se reposèrent sur l'écran. Les scènes et les dialogues ne faisaient plus aucun sens, même si ça ne le dérangeait pas plus que ça, au final. Et puis la demoiselle posa LA question.
« - String ou culotte ? Boxer ou slip ? Propre ou de la veille ? »
A chaque mot, sa voix paraissait amusée de ces différentes possibilités. Pourtant en réalité, ses paroles et ses sentiments se retrouvaient diamétralement opposés. Le blond n'était pas le bout-en-train qu'il montrait.
« - Il a l'air sympa. Elle devrait changer son style, on dirait qu'elle a un sac à patate sur le dos. On dirait un vrai crétin. C'est qui cette fille vulgaire ? Son deuxième prénom, c'est Robert ? »
Mark lâcha un soupir.
« - En fait, j'en sais rien. J'aime pas assez les gens pour ça et je sais même plus ce que j'ai pensé la première fois que j'ai vu certaines personnes. »
La dernière et unique personne qui avait dû l'entendre dire ça était le psychologue. Après de longues et douloureuses séances.
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Katarina Olivero
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Son visage fut possédé par la stupeur. L'italienne cligna des yeux et inspira comme si elle s'apprêtait à répondre mais aucun mot ne traversa ses lèvres. La bouche entrouverte, elle se contenta de tourner la tête en direction de l'écran. A vrai dire, elle regardait sans vraiment regarder puisque son esprit était ailleurs. Katarina ne répondit rien et laissa mijoter la réponse de son interlocuteur dans son esprit. C'est à cela qu'on devait penser en regardant quelqu'un ? Elle avait beau tourner la question sous toutes les coutures possibles, elle ne trouvait aucun intérêt à savoir ça. Si c'était un sondage pour faire des statistiques, ça pouvait passer et encore ! Mais là … Et puis, beurk ! Comment pouvait-on porter le même slip deux jours de suite ?! C'était ignoble !
Une grimace prit place furtivement sur ses traits avant qu'elle ne reprenne un visage sérieux. D'après le blond, la fille n'était pas du tout bonne actrice. Katarina tenta de faire sa propre analyse mais honnêtement, elle ne savait pas quoi en dire. Si les choses se passaient réellement comme ça, elle préférerait ne jamais les connaître. Toutefois, elle sourit à la rime de son voisin et releva son soupir. Hum ?
Là, ce fut une nouvelle surprise. Décidément, ce personnage était vraiment étrange. Il y a peine quelques secondes, il semblait amusé par sa réponse et se jouait du film puis, à l'instant, il semblait complètement déçu. L'air un peu déprimé, même ! A l'entendre, on croirait qu'il n'attendait plus rien de la part de qui que ce soit ou, carrément, de la vie. Mais, étrangement, Kat' éprouva beaucoup de sympathie pour lui à cet instant. Peut-être parce que son côté misanthrope se sentait moins seule de savoir que lui aussi avait du mal avec les gens visiblement. Les yeux figés sur lui, l'air sérieux, elle ne répondit que par une simple remarque : « - Au moins, on a un point commun. »
Le tout, agrémenté d'un sourire sincère qu'elle affichait pour la première fois depuis longtemps devant un être humain.
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