Quelques jours auparavant, elle avait contacté Gabrielle suite à sa proposition pour les affaires de Dylan. À vrai dire, son geste cachait aussi une pointe de curiosité. Et voilà, que ce soir, après s'être arrangée avec la maîtresse de maison, Kaimana avait débarqué. Avec une tarte au citron meringuée. Venir les mains vides ne se faisait pas et puis depuis le début de sa grossesse, elle adorait cuisiner et les agrumes. Elle n'avait pas des envies de fraises mais de crème au citron dont elle pouvait manger cuillère sur cuillère.

Elles avaient papoté pendant un moment puis la rousse s'était éclipsée pour revenir avec des affaires. Assise par terre, la blonde ouvrit lentement le carton. Cependant, elle ne regarda pas tout de suite le contenu. Ses ongles se plantèrent dans le matériau alors qu'elle hésitait. Puis lorsque ses yeux se posèrent sur les vêtements d'enfant, une exclamation lui échappa.

C'était tellement mignon, tellement adorable. Chonchon Junior – à défaut d'avoir son prénom, il avait au moins déjà ses surnoms - serait tellement à croquer. Le sourire qui rayonnait sur son visage en disait long sur ses sentiments d'ailleurs. Mais ce n'était pas tout. Kaimana enchainait les commentaires tout en s'enfermant dans sa bulle de future maman. Totalement déconnectée de ce qui l'entourait.

Le rendez-vous avait été arrangé, Gabrielle avait tout prévu. Jake et Heko étaient allongés sur le tapis, respectant docilement les consignes de leur maîtresse. Lorsque son invitée arriva, c'était avec une tarte au citron plus que délicieuse. Kaimana avait maintenant un ventre bien rebondi. Le bébé semblait poursuivre parfaitement sa croissance et ne demandait plus qu'à se préparer pour son arrivée dans le monde. Le moment était à présent venu d'aller chercher le butin convoité.

Elle avait recherché dans un fouilli d'affaires les cartons des habits qui avaient appartenu à Dylan, manquant plusieurs fois de s'assomer avec d'autres choses. Mais elle avait réussi et tout était à présent en plein milieu du salon où elle avait poussé la table pour permettre de laisser plus d'espace.

Gabrielle laissa Kaimana seule quelques instants pour préparer une autre théière. Elle écoutait cependant les commentaires de la future maman depuis la cuisin en souriant.

Soudain, elle entendit Jake se lever et Heko pousser un petit gémissement. Quelqu'un venait d'entrer dans la maison. La rouquine fronça les sourcils. Il n'y avait que deux personnes qui pouvaient rentrer dans son habitation sans autorisation et sans frapper. Mais une était sur Ep-2 tandis que l'autre visitait on-ne-savait-quel pays pour parler politique. Pourtant, c'était bien la voix de la deuxième personne que Gabrielle perçut très clairement. Son coeur rata un battement et elle n'avait même pas écouté après son prénom. C'était impossible.

Alors elle entra dans le salon à son tour et le vit, dans sa tenue de Gouverneur, avec l'air d'avoir vu un fantôme. Lentement, elle le détailla comme si elle ne l'avait pas vu depuis des années avant de suivre son regard, porté sur Kaimana. A le voir ainsi, il ne fallait pas posséder un don de télépathie pour comprendre. Gabrielle s'avança vers la blonde, se penchant vers elle pour lui chuchoter.

Ne me dis pas que vous avez fait la bêtise de ne pas prévenir le vieil ours...

Encore ce nom de code. Il valait mieux ne pas trop parler fort pour l'instant, et surtout pas de cela. L'Irlandaise se redressa légèrement et fixa Beal.

Ravie de voir que tu es toujours en vie...

Même si elle avait cette envie de le prendre et de le serrer dans ses bras (le fait que Kaimana soit elle présente dans la pièce jouait pas mal aussi), elle ne pouvait s'empêcher de repenser au fait qu'il ne l'avait jamais ni appelée, ni envoyé de messages.

Ses cils battirent faiblement au gémissement de Heko. Une voix puissante la fit sursauter et lorsqu'il apparut dans le salon, Kaimana resta interdite. Ses doigts en lâchèrent même la grenouillère qu'ils avaient découvert. La blonde blêmit avant de passer des joues rosées à pivoines. Qu'est-ce qu'elle devait dire ? À son expression, Le Gouverneur avait dû comprendre. Oui, c'était la seule qui la préoccupait pour le moment. Sa tête bougea doucement afin de confirmer les propos de Gabrielle. Mais il devait être rentré en express, sinon Wrath l'aurait fait, non ?

Restant encore silencieuse, un petit moment, elle écouta la rousse. Un de ses sourcils se haussa. Non, elle devait s'imaginer des choses. Puis d'une toute petite voix, Kai décida de bredouiller quelques mots.

— Bonsoir, Monsieur le Gouverneur...

Juste après, elle reprit l'habit délaissé. Ses mains le triturèrent nerveusement. Gabrielle et lui semblaient avoir des choses à se dire. Mais elle aussi, elle devait bien aborder un certain sujet. Un peu perdue, Kaimana regarda Beal puis Gabrielle, puis à nouveau Beal. Maintenant, pas maintenant ?

Oh et puis zut ! Elle parlerait quand il lui poserait des questions ! C'était le Directeur du projet et le doyen de la famille ! Pas besoin de se prendre la tête.

L'ambiance bon enfant et conviviale avait disparut. Complètement disparu. Gabrielle regardait Kaimana. La pauvre, elle n'y était pas vraiment pour grand chose dans cette histoire au final et semblait plus mal à l'aise qu'autre chose.

Lorsque Beal s'adressa à elle, l'Irlandaise sursauta légèrement. Elle s'attendait à ce qu'il parle à sa belle-fille et non à elle. Mais non, Monsieur avait décidé de jouer l'autruche et d'ignorer la future mère. A la place, il parlait de préparer des affaires, de partir dans deux heures. Gabrielle n'eut pas le temps de réagir, le Gouverneur était déjà en haut, probablement dans sa chambre pour faire la valise.

La rouquine resta quelques secondes décontenancée. Elle ne comprenait vraiment pas ce qu'il venait de se passer. Mais une chose était sûre, c'était qu'elle n'allait pas rester ignorante. Elle sourit gentiment à Kaimana, comme pour la rassurer.

Je m'occupe de lui, ne t'en fais pas. Tu peux rester dans le salon, ça ne prendra pas très longtemps... surtout s'il veut partir d'ici deux heures.

Elle laissa alors la jeune femme et suivit le même chemin que Beal, le retrouvant dans sa chambre. Elle croisa les bras et s'arrêta à l'entrée de sa pièce.

J'ai le droit à des explications.

Elle ne bougerait pas tant qu'il ne lui expliquerait rien.

Au même titre que Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ; Pas de réaction, bonne réaction. Kaimana préférait être ignorée que de tenir une conversation. Au fond, elle ne savait jamais sur quel pied danser avec le Gouverneur. Finalement, sa future belle-mère tenace, celle qui devait être prête à dire ''Je ne l'accepterais jamais pour mon fils'', elle l'avait. Plus belle-mère que beau-père pour le coup. La voix de la propriétaire des lieux la tira de ses pensées. La blonde faillit répondre qu'elle pouvait partir, que ce n'était pas grave mais Gabrielle était déjà partie.

Dans la même direction que Beal. Dans la même direction que Beal. Ses sourcils se froncèrent. Quel homme rentrait comme dans un moulin chez une femme puis filait quelque part comme s'il était chez lui ? C'était terriblement familier comme comportement. Tout en réfléchissant, elle rangea les affaires sorties puis referma avec le carton. Ses doigts tambourinèrent sur le dessus de la boite. Franchement, si elle n'avait pas été chez Gabrielle, elle aurait fui en douce.

Ses yeux s'écarquillèrent. Il avait osé lever le ton et la traiter comme un soldat lambda. S'il pensait qu'il pouvait jouer les gouverneurs dans une situation pareille, il se fourrait le doigt dans son unique oeil. Gabrielle lui lança alors un regard qui en disait long et resserra ses bras croisés, campant sur sa position.

Finalement, il avait compris que cela ne servait à rien et se radoucit. Mais elle ne bougea pas pour autant. Elle n'avait eu aucune réponse à ses interrogations. Mais quand elle le vit s'asseoir sur son lit, elle se rendit compte que la situation était différente de ce qu'elle aurait imaginé. Elle le laissa parler, sans bouger, avant de finalement faire quelques pas vers lui. Elle s'accroupit devant lui pour tenter de le regarder.

Il y a sûrement une raison qui fait qu'il ne t'ait rien dit. Je ne sais pas, il attendait peut-être le bon moment ou il était en mission et toi aussi... Imagine, il n'est même pas au courant lui-même !

Elle essayait de le rassurer, mais c'était difficile. Elle-même ne savait pas comment elle réagirait s'il s'agissait d'Annie. Timidement, elle se redressa tout en passant ses bras autour du Gouverneur. Elle espérait ne pas essuyer de refus de la part de Beal.

Je sais que c'est difficile et que ça doit te faire un choc... Mais c'était prévisible. Ils sont grands, ils sont ensemble depuis longtemps, je ne pense pas que ce soit irréfléchi.

Elle ne lui dit pas qu'elle était au courant de beaucoup de choses. Il n'avait pas besoin de savoir. Il semblait déjà assez affecté pour qu'elle lui rajoute ça. Et puis, ce n'était pas son rôle.

Justement, ta vraie famille est en route. Tout se passera bien, surtout après la naissance du bébé.

Gabrielle était optimiste. Elle croyait vraiment à la réunification de la famille Rockefeller/Clayworth grâce à cet enfant.  En l'entendant parler ainsi, le coeur de la rouquine se serra. Mais elle était confiante. Tout rentrerait dans l'ordre.

Elle profita de l'étreinte de Beal. Après tout, il était parti en mission pendant un temps assez long, elle avait bien le droit à un petit quelque chose pour les retrouvailles. Bien entendu, cela ne dura pas éternellement, mais c'était déjà mieux que rien.

Ce que Beal souhaitait faire la surprit. A vrai dire, elle avait l'intention de l'envoyer de force à l'étage inférieur pour qu'il parle avec sa belle-fille, mais il le faisait finalement de gré. L'Irlandaise était presque déçue, mais elle n'allait rien dire, il tentait de faire bouger les choses de lui-même. La quarantenaire se mit rapidement au garde-à-vous, avec le sourire.

Oui, Monsieur le Gouverneur ! Et n'oubliez pas de la féliciter ! Et bravo pour la prise d'initiative, je suis fière de vous !

Elle ne se moquait pas. Bon d'accord, juste un petit peu. Rapidement, elle attrapa le visage du vieil ours et posa ses lèvres sur son nez. Un sourire vainqueur et la voilà qui commençait à faire sa valise. Il avait dit rapidement.

Dans le salon, après avoir arrangé le carton des affaires de Dylan, afin que le nom ne soit plus visible, Kaimana avait décidé de focaliser son attention sur le vieux Jake. Elle lui gratouillait la tête tout en lui parlant. En même temps, la blonde n'avait pas grand chose à faire, à part attendre. Et encore attendre. Elle soupira priant pour le retour rapide de Gabrielle. Quelques secondes plus tard, une voix la faisait sursauter. Elle implorait la rousse, le Gouverneur arrivait.

Et n'y allait pas par quatre chemin.

— Je ne sais pas, Monsieur. J'ai demandé à attendre le retour de Wrath pour connaître le sexe. Ça me semblait plus... juste.

Tout s'était précipité dans sa tête et elle avait débité ses mots sans réfléchir. Ce n'était pas la vérité, mais ça aurait pu l'être au fond. Gardant une main sur la tête du chien, elle hésita. Il y avait bien une question qu'elle souhaitait poser.

— Ça.. Ça ne vous dérange pas que ça arrive alors qu'on est pas marié ?

Oui, elle imaginait Beal comme un peu vieux jeu. Alors autant se renseigner, même si au fond, c'était trop tard.

Ne relevant pas le commentaire, elle jeta un coup d'oeil à Jake. D'un coup, ses oreilles virèrent cramoisies. Ah, ce brusque sentiment de honte. Toutefois, il ne dura pas. Dès que le Gouverneur évoqua une éducation par d'autres, elle reprit du poil de la bête.

— Je ne veux pas qu'il soit élevé par d'autres personnes.

Le ton était affirmatif. C'était inconcevable d'être séparé de lui. C'était leur fils. C'était son enfant. Elle n'avait pas l'intention de laisser quelqu'un d'autre prendre le rôle de parents. Malgré tout, Kaimana était étonnée de l'entendre parler du passé. Elle n'avait jamais entendu son point de vue, ni son ressenti au fond. Toujours hésitante, la blonde songea à s'exprimer un peu plus. Pour une fois.

—  Wrath... Je pense qu'il fera tout pour que ça n'arrive pas. Même si en toute honnêteté, je suis certaine qu'il y aura des périodes ou... Il voudra absolument tenir son rôle de militaire. Il est comme ça, avec un sens des responsabilités qui peut le ronger, des jours, voire des mois. Mais si on se repose l'un sur l'autre, ça devrait aller.

Un petit sourire illumina son visage.

—  Je sais que ça va paraître ridicule, mais je me dis que si on regarde dans la même direction, alors tout ira bien.

Ses cils battirent un instant. Est-ce qu'il venait de lui dire qu'il avait confiance en elle ? Qu'elle serait peut-être une bonne mère ? Sans savoir quoi dire, elle fixa le Gouverneur puis la blonde finit par sourire. Pas un énorme sourire mais au moins, celui-ci ne semblait pas timide. À la dernière phrase, Kaimana ne se fit pas prier. Ses jambes commençaient à lui faire mal. Pourtant ce n'était pas ce qui la tracassait le plus. Tout en déglutissant, elle s'installa. Ses yeux lui paraissaient étrange. Surtout ne pas y penser.

Une fois sur le canapé, elle mordit ses lèvres. Elle détestait cette sensation de perte de contrôle, quand ses émotions tentaient de la submerger.

— Monsieur... Rockefeller ?

Pouvait-elle l'appeler ainsi ? Son visage se tourna vers le sien. Elle avait l'impression d'avoir les yeux humides. Ce n'était pas le moment.

— Je pense reprendre ma formation après la naissance du bébé. Est-ce que... vous seriez plutôt pour ou contre ?

Kaimana saisissait l'occasion qui se présentait pour lui parler. Elle voulait son avis en tant que homme, père de son petit ami et futur grand-père. Toutefois, elle ajouta bien vite comme pour se rattraper d'une possible bêtise.

— C'est assez égoïste et puis ça imposerait aussi des choses à Wrath mais je ne veux rien lâcher.

Le dos de sa main droite passa devant ses yeux et n'en bougea pas.

Gabrielle était quelqu'un de très organisée. Et elle avait aussi été élève sur le projet. Se dépêcher de faire ses valises pour partir vite, elle savait un peu le faire. Mais la curiosité de pouvoir écouter la conversation entre Beal et Kaimana n'était pas pour la ralentir, bien au contraire. En très peu de temps, la valise était bouclée et posée en haut des escaliers. La rouquine quant à elle, était postée sur les premières marches, de façon à être invisible, mais pouvoir entendre. Le meilleur poste d'observation en somme.

Elle était le témoin de toute la discussion, du questionnement sur le sexe du bébé jusqu'à l'invitation du Gouverneur pour que la future maman s'installe sur le canapé. Elle avait manqué d'intervenir lorsque Beal avait haussé le ton, mais c'était retenu et finalement, la situation était redevenue calme. Au final, tout semblait bien se passer et l'Irlandaise se surprit à sourire tristement. Pour elle, elle n'était pas encore vraiment dans la famille, dans cette famille et se sentait même un peu étrangère, pour le moment.

Elle était tellement perdue dans ses pensées qu'elle n'entendit pas Beal dire qu'il revenait. Son esprit retrouva le monde réel lorsqu'une porte se referma. Instantannément, la militaire dévala l'escalier, comme pour tenter de le rattraper. Il était déjà arrivé comme un voleur, il n'allait pas faire la même en repartant, surtout après lui avoir dit qu'ils partaient tous les deux.

Beal ? BEAAL ?
«GUEULE PAS ET LAISSE-MOI CHIER ! »

Gabrielle abattit sa main sur son visage, couvrant ses yeux. Elle resta comme cela un instant avant de soupirer longuement. Beal était un homme comme les autres.

Je ne veux pas de détails...

Un nouveau soupir. Et puis elle se retourna vers Kaimana avec un sourire désolé.

Ce n'est pas très distingué, désolée que tu aies dû assister à ça...

Elle avait très envie de lui demander son ressenti par rapport à sa discussion avec Beal, mais c'était vraiment trop indiscret. Alors elle opta pour une méthode détournée.

Je vais te rapporter une tasse de thé.

Aussitôt dit, aussitôt fait, elle tendit la tasse chaude à la jeune fille, toujours avec le sourire.

Ca va toujours ? Pas trop fatiguée ? Si tu as besoin, tu peux t'allonger sur le canapé, ou dans la chambre d'Annie.

Savoir que ce programme existait, était une bonne chose. Peut-être même pouvait-elle s'y inscrire dès maintenant. Refuser cette possibilité ne lui traversa même pas l'esprit. C'était une trop belle opportunité pour ça. Maintenant que le sujet était lancé, elle avait envie de lui poser de nouvelles questions. Sauf que ce ne serait pas pour tout de suite, songea-t-elle.

— D'accord !

Une fois seule, Kaimana sentit quelque chose dévaler ses joues. Les essuyant rapidement, elle baissa la tête mais sursauta brusquement au cri de Gabrielle. La réponse qui ne tarda pas, lui donna l'impression d'être chez un couple. Adressant un regard dubitatif à la rousse après l'élan poétique du Gouverneur, la blonde finit par secouer la tête. C'était pas grave. Après tout, elle n'était pas sûre que le modèle junior soit plus distingué dans certaines situations.

Sa bouche s'ouvrit pour dire à la maîtresse de maison qu'elle n'avait besoin de rien, mais c'était trop tard là aussi.

— Juste.. Juste mes jambes mais Monsieur R-le Gouverneur...

Elle indiqua le canapé. Si elle s'allongeait, elle prendrait toute la place.

Oh tu sais, il est peut-être sur la pente descendante, mais il peut encore tenir debout ou s'asseoir ailleurs.

Gabrielle avait parlé assez fort, mais force était de voir que Beal était plutôt concentré sur son affaire. La rouquine soupira encore avant de prendre une chaise de sa salle à manger pour la mettre en face du canapé où se trouvait Kaimana, comme pour lui dire de vraiment s'installer comme elle voulait.

Utilise les coussins pour te caler, tu verras, ça te fera du bien.

Elle parlait en connaissance de cause. Cette technique avait toujours marché, par deux grossesses. L'Irlandaise s'assit sur la chaise et but une gorgée de thé qu'elle avait ramené aussi pour elle.

Tu as trouvé ton bonheur dans mon vieux carton ?

Elle cligna des yeux. Gabrielle Cooper et Beal Rockefeller étaient vraiment très proches, il n'y avait pas à dire. Mais pas de commentaire de sa part. Suivant les conseils de la rousse, Kaimana arrangea les coussins et soupira en se sentant un peu mieux.

— Oui, j'ai vu des pyjamas adorables...

Sa tête se tourna en direction de là où le Gouverneur était parti. Sa voix se baissa un peu pour être sûre que seule, la rouquine l'entende.

— Je n'ai pas regardé davantage et puis je n'ai pas voulu annoncer le sexe du bébé... En tout cas, je suis contente d'avoir pu discuter, même un peu, avec monsieur le Gouverneur. Et d'un côté, je suis rassurée. Si quelque chose venait à m'arriver, je suis certaine qu'il aiderait Wrath.

Sa voix était redevenue normale. Ses yeux se baissèrent vers sa tasse et elle la porta à ses lèvres. La vie, la mort, elle n'arrivait pas à dissocier les deux.

Gabrielle fixa le carton un long moment sans rien dire. Si elle avait trouvé son bonheur, c'était l'essentiel.

Tu pourras les prendre soit maintenant, soit plus tard, ce n'est pas un souci, je garderai le carton à portée de main cette fois.

La rouquine n'eut pas besoin de demander comment cela s'était passé avec Beal, Kaimana avait parlé d'elle-même. C'était ce que Gabrielle avait recherché de toute façon. Elle était curieuse, mais elle ne forcerait personne. Elle ne put s'empêcher de sourire. Beal avait fait de gros progrès depuis le début de la relation de son fils avec cette blonde et elle était sûre qu'il continuerait sur la bonne voie.

Ne sois pas aussi pessimiste, il n'y a aucune raison pour qu'il t'arrive quelque chose pour l'instant. Concentre-toi sur le bébé, tu auras déjà bien assez à faire. Et élimine ces mauvaises ondes, c'est mauvais pour ta santé, mais pas seulement !

L'Irlandaise fronça alors les sourcils. Son regard vert partit en direction de la porte derrière laquelle se cachait le gouverneur, ça faisait quand même sacrément longtemps qu'il était là-dedans.

Et c'est lui qui voulait qu'on se dépêche...

La rouquine claqua des doigts. Aussitôt, Heko se précipita vers le panier pour y chercher une balle qu'elle apporta directement à sa maîtresse. Cette dernière s'empara de l'objet et le lança dans une direction bien précise. La balle heurta la porte des toilettes en résonnant.

La blonde acquiesça en silence. La suite lui donna envie de rire mais elle s'en garda. Elle comprenait que Beal et Gabrielle devaient partir rapidement, que l'affaire semblait importante, toutefois la rousse n'occupait pas un des grades les plus élevés. Les yeux rivés sur Heko, Kaimana eut un petit sourire. Il y avait quelque de fascinant dans le dressage. Gabrielle devait vraiment avoir une patience d'ange.

Bientôt, le Gouverneur refit son apparition. Son visage se tourna dans sa direction, intriguée. Si les paroles l'étonnaient, de possibles sanctions pour une langue trop pendue ne la surprenaient pas. Mais, la blonde ne voyait pas à qui elle parlerait de ça, de toute façon. Ses yeux s'agrandirent au fil des mots. Elle était surprise sans vraiment l'être. En tout cas, ceci expliquait la familiarité affichée et elle ne put s'empêcher d'adresser un petit sourire espiègle à Gabrielle. La seule ombre au tableau était : attendre que Wrath l'apprenne. Elle l'imaginait déjà tirer une tête de quinze pieds de long si elle avouait être au courant. Bah, à chaque problème, sa solution et ça valait aussi pour cette situation.

Une fois que l'homme eut fini, Kai se redressa légèrement. Cette nouvelle lui avait donné une idée.

— Du coup si vous êtes de retour en Novembre... que diriez-vous de venir à l'appartement après la naissance du bébé ? Pour un repas de famille ? Bien sûr, en fonction de vos disponibilités et si Wrath n'est pas en mission...

Enthousiaste ? Pas qu'un peu !